Mesdames et Messieurs les participants,
Il me fait immensément plaisir de vous accueillir à la quatorzième réunion de la Conférence des Parties à Convention sur la diversité biologique (CDB) et réunions connexes, regroupées sous l’appellation « Conférence des Nations Unies sur la biodiversité 2018 ».
Ce plaisir est tout particulier car il s’agit de la première Conférence des Parties à se dérouler en Afrique depuis l’année 2000. La communauté internationale est réunie ici, en Égypte, terre des légendaires civilisations antiques, et sur le continent qui a vu naître l’humanité, afin de célébrer le 25 anniversaire de l’entrée en vigueur de la Convention.
Les Parties sont engagées depuis vingt-cinq ans déjà aux niveaux national, régional et mondial à réaliser les objectifs de la Convention afin de conserver la diversité biologique, l’utiliser de manière durable et partager de façon juste et équitable les avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques. De plus, les acteurs de la société civile, ainsi que les peuples autochtones et les communautés locales, et les partenaires du secteur privé de partout au monde ont joué un rôle essentiel pour faire avancer la Convention.
En revanche, la science a révélé un déclin tragique de la diversité biologique et des écosystèmes dans toutes les régions du monde, un fait que confirment les récents rapports de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques.
Cette réunion est d’une importance critique dans notre parcours collectif pour la protection et la sauvegarde de la vie sur Terre. Nous devons communiquer un message clair au monde et aux plus hautes sphères politiques, sociales et économiques que la sauvegarde de la diversité biologique et de la santé des écosystèmes de la planète est essentielle à notre survie et à notre bien-être social et économique à tous, à l’échelle de la planète. Les écosystèmes sains sont une source de nourriture, d’air propre à respirer, d’eau propre à boire et de travail pour assurer la subsistance de nos familles, en plus de nous protéger en atténuant les conséquences des changements climatiques.
Au cours de cette réunion à Charm el-Cheikh, les Parties à la Convention débattront des efforts déjà entrepris et des efforts supplémentaires nécessaires pour atteindre les 20 Objectifs mondiaux pour la biodiversité aussi appelés les Objectifs d’Aichi relatifs à la diversité biologique. À deux ans de la fin de la décennie pour la diversité biologique en 2020, il est temps plus que jamais de redoubler d’efforts pour protéger la diversité biologique et trouver des moyens d’appliquer des approches transformatives, innovatrices et pragmatiques axées sur les solutions.
Les débats entourant l’intégration de la diversité biologique dans cinq secteurs clés de l’économie, à savoir les infrastructures, l’exploitation minière, l’énergie et le gaz, la fabrication et la santé, seront un des aspects les plus intéressants et innovateurs de la Conférence des Nations Unies sur la biodiversité 2018.
L’intégration de la diversité biologique dans ces secteurs a pour but d’éviter, de réduire ou d’atténuer les impacts négatifs tout en maximisant les avantages potentiels. Cette mesure est pertinente et vient à point nommé, car la plupart de ces secteurs connaîtront une forte croissance au cours des prochaines décennies. Par exemple, on estime que les pays investiront quelque 90 billions de dollars(1) dans les infrastructures et environ 25 billions de dollars(2) dans le secteur de l’énergie au cours des 15 prochaines années, ce qui pourrait avoir des répercussions considérables ou encore mieux, des avantages pour la diversité biologique.
Le dossier critique de la biodiversité biologique et des changements climatiques occupera une place dominante à l’ordre du jour. La diversité biologique et les solutions axées sur la nature peuvent aider à réduire les effets dévastateurs des changements climatiques, notamment par le biais d’approches axées sur les écosystèmes pour atténuer les changements climatiques, s’y adapter et réduire des risques de catastrophe. Une récente étude(3) suggère que les solutions naturelles pour le climat peuvent offrir jusqu’à 37 pour cent de la réduction rentable du CO2 à réaliser d’ici à 2030 afin de donner plus de 66 pour cent de chances de maintenir le réchauffement sous les 2°C.
La Conférence se penchera évidemment sur la question importante des aires protégées, autant terrestres que marines, et les autres mesures pour améliorer la conservation et la gestion de la diversité biologique, et les délégués poursuivront leurs débats de longue date sur les aires d’importance écologique ou biologique.
Les gouvernements aborderont au titre de la Convention et de ses deux protocoles, le Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques et le Protocole de Nagoya sur l’accès et le partage des avantages, les questions importantes que soulèvent les technologies en émergence, notamment la façon de gérer des avancées dans le domaine de la biologique synthétique afin de maximiser les avantages potentiels tout en minimisant les risques. Ils débattront également des conséquences de la séquence numérique d’informations sur les ressources génétiques dans le contexte des objectifs de la Convention et du Protocole de Nagoya.
Les Parties à la Convention auront l’occasion de passer en revue les progrès accomplis dans l’application du Protocole de Nagoya et de discuter des nouveaux développements pertinents en matière de politiques. Cent cinq Parties à la Convention ont ratifié le Protocole à ce jour. La réunion attirera l’attention sur des points importants, dont l’évaluation et l’examen de l’efficacité du Protocole à faire le bilan et à recenser ses victoires et ses difficultés depuis son entrée en vigueur en 2014. Cette évaluation aidera la troisième réunion de la Conférence des Parties siégeant en tant que réunion des Parties au Protocole de Nagoya à soutenir davantage l’application au Protocole dans les pays.
Un des objectifs les plus importants de la Conférence des Nations Unies sur la biodiversité 2018 sera de préparer le terrain pour le processus de développement du successeur de l’actuel cadre mondial pour la diversité biologique qui marque la fin du Plan stratégique 2011-2020 pour la diversité biologique. Nous avons une occasion unique, en tant que communauté mondiale, de définir un nouvel accord ambitieux pour la nature et la diversité biologique pour l’après-2020, un accord qui reconnaîtra la valeur de la nature sous tous ses aspects, notamment politique, économique, social et scientifique, en tant qu’infrastructure fondamentale qui soutient la vie sur Terre, ainsi que le développement et le bien-être de tous les humains. Cet exercice exigera un engagement et une détermination à toute épreuve, des approches innovatrices et des processus transformationnels, et aussi une étroite collaboration et l’unité de toutes les parties prenantes.
J’aimerais terminer en vous rappelant notre vision commune : « D’ici à 2050, la diversité biologique est valorisée, conservée, restaurée et utilisée avec sagesse, en assurant le maintien des services fournis par les écosystèmes, en maintenant la planète en bonne santé et en procurant des avantages essentiels à tous les peuples. » Nous pouvons réaliser cette vision, par la collaboration seulement, afin de créer un changement transformationnel et une modification du paradigme dans notre utilisation et nos relations avec la nature et la biodiversité.
En qualité de Secrétaire exécutive de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, je crois fermement que les Parties à la Convention, les partenaires et les parties prenantes peuvent, ensemble, mobiliser le leadership nécessaire au plus haut niveau, utiliser le dynamisme public et politique pour le changement et élever les ambitions pour l’application à un niveau encore plus élevé. Formons « l’équipe de la nature », sur-le-champ et plantons la semence d’un mouvement mondial pour la biodiversité qui touchera le cœur et l’esprit de tous et mobilisera tous les peuples à agir pour la planète.
Merci.
Dr. Cristiana Paşca Palmer
Secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique
- Amar Bhattacharya, Jeremy Oppenheim and Nicholas Stern. Driving sustainable development through better infrastructure: Key elements of a transformation program. (The Brookings Institution, 2015)
- The New Climate Economy (The Global Commission on the Economy and Climate, 2016)
- Bronson W. Griscom et al., Natural Climate Solutions, (Proceedings of the National Academy of Sciences Oct 2017)